Discours
Speeches
Mon discours lors de la réunion annuelle du (CLCCG).
La Première Dame, Dominique Ouattara a participé à la réunion du groupe de coordination des actions de lutte contre le travail des enfants dans la cacaoculture, au Ministère américain du travail, le mercredi 24 juin 2015 à Washington. Une occasion pour la Présidente du Comité National de Surveillance des actions de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (CNS) de partager l’expérience de la Côte d’Ivoire dans la lutte contre ce phénomène.
Mesdames et messieurs
Je suis heureuse d’être aujourd’hui à Washington DC, pour participer à la réunion du Groupe de Coordination des actions de lutte contre le travail des enfants dans la cacaoculture, un sujet qui me préoccupe particulièrement.
Comme vous le savez, à l’instar de bon nombre de Pays dans le monde, la Côte d’Ivoire est confrontée à ce problème depuis plusieurs décennies.
C’est pourquoi, dès son accession à la magistrature suprême, le Président de la République, ayant pris connaissance de l’ampleur du problème du travail des enfants, a fait de la lutte contre ce fléau, une priorité nationale, en créant par décrets deux Comités :
– le Comité Interministériel de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (CIM) représenté ici par madame la Ministre Anne OULOTO,
– et le Comité National de Surveillance (CNS), que j’ai l’honneur de présider.
C’est une fonction que j’assume de façon bénévole depuis quatre ans et je le fais avec tout mon cœur car, tout ce qui a trait aux enfants me touche profondément. J’ai donc fait de la lutte contre le travail des enfants un de mes engagements majeurs en ma qualité de Première Dame.
Mesdames et messieurs,
A la création du CNS, j’ai initié en étroite collaboration avec les principaux acteurs et partenaires engagés dans la lutte contre le fléau, l’élaboration et l’adoption d’un Plan d’Action National 2012-2014 de lutte contre le travail des enfants dont je voudrais ici vous présenter quelques résultats.
• Tout d’abord en matière de prévention du phénomène, nous avons travaillé au renforcement du cadre légal et règlementaire pour l’adoption de plusieurs textes, dont celui interdisant les pires formes du travail des enfants en côte d’Ivoire.
• Ce texte a permis l’arrestation et la condamnation de 23 trafiquants d’enfants à des peines d’emprisonnement fermes.
Hier encore, grâce à notre collaboration avec INTERPOL, nous avons pu arrêter plusieurs trafiquants et délivrer une cinquantaine d’enfants qui travaillaient dans les champs.
Le dispositif légal et règlementaire en matière de lutte contre le travail des enfants en Côte d’ Ivoire est donc devenu plus efficace pour combattre le fléau.
• Nous avons également travaillé au renforcement de la coopération sous régionale, par la signature de deux accords de coopération : l’un avec la Première Dame du Mali, l’autre avec la Première Dame du Burkina Faso.
Ces accords permettent d’avoir un cadre formel permanent de concertation et de coopération pour la lutte contre la traite transfrontalière des enfants.
• En ce qui concerne la sensibilisation des populations, nous avons initié des campagnes de proximité dont le but est de susciter une prise de conscience nationale en vue d’une adhésion des populations à l’effort national de lutte contre les pires formes du travail des enfants.
Dans cette optique, les producteurs de cacao ont été sensibilisés sur les travaux dangereux interdits aux enfants et l’interdiction d’utiliser la main d’œuvre enfantine au sein de leurs plantations.
• Toujours dans le cadre de la prévention, nous mettons un accent particulier sur le renforcement des capacités des acteurs.
A cet effet, nous avons organisé plusieurs séminaires de formation à l’intention des Préfets ; des Magistrats ; des Maires ; des inspecteurs du travail ; des Policiers ; des Gendarmes ainsi que des journalistes. Ces séminaires ont permis de doter ces acteurs de connaissances techniques et d’outils capables d’améliorer leurs interventions sur le terrain.
• Ensuite, en matière de protection des enfants, nous avons entrepris le renforcement de l’accès des enfants à l’éducation. En effet, la non scolarisation des enfants les rend plus vulnérables et favorise leur exploitation.
• C’est pourquoi, la réalisation d’infrastructures scolaires de proximité et l’amélioration des conditions de travail des élèves et des enseignants, constituent des axes majeurs de la stratégie nationale en matière de lutte contre les pires formes du travail des enfants.
A ce titre, d’importantes actions ont été menées, au nombre desquelles:
– la construction et la réhabilitation de plus de 6.000 salles de classe par l’Etat de Côte d’Ivoire;
– la construction et la réhabilitation de 110 écoles primaires ainsi que de 32 cantines scolaires par les partenaires de la cacaoculture.
– et la distribution de 10.891 kits scolaires aux enfants démunis.
Mesdames et messieurs,
Une de nos préoccupations majeures est l’amélioration des conditions de vie des paysans. A cet effet, l’Etat a pris des mesures pour améliorer la productivité en vue d’accroître leurs revenus. Cela a été possible grâce à la vaste réforme de la filière café-cacao qui a permis de doubler les revenus des paysans grâce aussi à la distribution de produits phytosanitaires ainsi que de semences améliorées de cacao, initiatives entreprises tant par l’Etat que par les industriels de la cacaoculture. Par ailleurs, la création d’activités génératrices de revenus au profit des femmes, constitue un de nos axes d’intervention. En effet, les femmes sont des actrices majeures du développement communautaire et sont indispensables pour éradiquer les pires formes du travail des enfants.
Aussi, 60.000 femmes à travers le pays ont bénéficié du Fonds d’Appui aux Femmes de Côte d’Ivoire (FAFCI), un projet que j’ai initié en 2012 et qui permet de financer les activités génératrices de revenus des femmes par l’octroi de micro-crédits.
En matière de coordination et de suivi-évaluation des actions de remédiation, nous avons mis en place le Système d’Observation et de suivi du travail des enfants (SOSTECI)dans 7 Départements producteurs de cacao, pour l’établissement d’une base de données nationales, une meilleure coordination des actions et un meilleur suivi des enfants retirés des pires formes de travail.
Mesdames et messieurs,
Afin d’évaluer nos efforts, notre Plan d’Action National prévoyait la réalisation d’une enquête sur le travail des enfants en Côte d’Ivoire, pour mieux orienter les actions de remédiation. Ainsi, nous avons signé ici même à Washington, le 28 Octobre 2013, sous l’égide de l’USDOL, un protocole d’accord avec l’Université de Tulane, pour la réalisation de cette enquête. Aujourd’hui, après plusieurs mois de recherche, les résultats de cette enquête sont connus et, j’aimerais adresser mes remerciements à toutes les parties qui ont contribué à sa réalisation, en particulier l’USDOL, pour le financement de cette étude.
Toutefois, permettez-moi de faire quelques observations sur ces résultats.
En premier lieu, cette enquête nous apporte beaucoup d’informations utiles et chiffrées sur le phénomène du travail des enfants dans la cacaoculture en Côte d’Ivoire.
En second lieu, cette enquête montre un nombre important d’enfants travaillant à des travaux dangereux dans les plantations soit 1.153.000 enfants, chiffre particulièrement impressionnant mais ce chiffre global doit être analysé attentivement. Tout d’abord l’enquête de Tulane, nous indique que le taux de scolarisation des enfants impliqués dans les travaux dangereux s’est amélioré, soit 71% contre 58% en 2008. A cet effet, nous voudrions d’une part faire une distinction entre les enfants victimes de traite qui sont exploités dans les champs et déracinés de leurs foyers, sans aucune possibilité d’aller à l’école d’une part.
Et d’autre part, les enfants de paysans qui accompagnent occasionnellement leurs parents après les heures de cours. Cette distinction est très importante à mon avis et devrait être prise en compte par tous les acteurs car, il serait inacceptable pour les paysans de classer leurs enfants dans la catégorie d’enfants exploités. Si ces enfants qui font du travail socialisant et apprennent à aimer le métier de leurs parents font des travaux dangereux, alors nous devons refaire une campagne de sensibilisation plus importante auprès de leurs parents, afin de leur expliquer les travaux dangereux auxquels ils ne doivent plus exposer leurs enfants.
J’ai interrogé la structure qui a effectué l’enquête sur le terrain pour le compte de l’Université de Tulane et qui est présent aujourd’hui avec nous à Washington. Il s’agit del’ENSEA, l’Ecole Nationale de Statistique et d’Economie Appliquée dirigée par monsieur KOFFI N’Guessan ici présent.
Selon le rapport, sur 1 153 000 enfants concernés par les pires formes du travail des enfants, 819 000 enfants, soient 71 % vont à l’école et vivent auprès de leurs parents. Ce chiffre est en nette expansion ce qui est compréhensif vu l’augmentation de la production et donc du nombre de paysans et leurs enfants. Le reste, soit 334 000 enfants ne sont pas scolarisés. C’est dans ce groupe de 334 000 enfants que nous pouvons trouver deux catégories d’enfants. D’un côté les enfants qui vivent en famille mais qui ne sont pas scolarisés et de l’autre, les enfants victimes de la traite, de l’exploitation du travail des enfants. Cette dernière catégorie est celle que nous devons combattre de toutes nos forces car, ces enfants sont parfois confiés à des personnes malhonnêtes qui profitent de l’extrême pauvreté et de l’ignorance des parents. Ces enfants sont, soit issus de la traite transfrontalière, soit issus des régions les plus reculées de la Côte d’Ivoire.
La première catégorie d’enfants non scolarisés sera plus facile à combattre car, le Gouvernement a décidé qu’à partir de septembre 2016, l’école sera obligatoire et gratuite jusqu’à 16 ans pour tous les enfants vivants sur le sol ivoirien. Cette grande avancée a été possible grâce à la construction de nombreuses écoles et salles de classes supplémentaires à travers tout le Pays par l’Etat de Côte d’Ivoire et tous les partenaires engagés à nos côtés.
A ce stade de mon propos, je voudrais remercier les industriels du chocolat, les fondations ICI et World Cocoa Fondation qui ont été d’un apport immense pour éradiquer le fléau du travail des enfants. J’adresse également mes remerciements auBureau International du Travail, à l’UNICEF, ainsi qu’à toutes les ONG nationales et internationales pour leur importante contribution dans ce combat.
Mesdames et messieurs,
En dehors de la scolarisation obligatoire, qui obligera les parents à envoyer leurs enfants à l’école, nous avons des raisons d’espérer en une réduction du phénomène.
En effet, le rapport démontre que parmi les enfants impliqués dans les travaux dangereux, 311 000 enfants sont des adolescents de 15 à 17 ans, qui sont pointés du doigt à cause de la nature de certaines activités ainsi que des conditions de travail.
A cet effet, nous avons déjà identifié certaines mesures de remédiation à ce problème.
Il s’agit de la distribution d’équipements adéquats pour créer un environnement de travail protecteur et légal.
Cette distribution sera faite par le conseil café-cacao à la prochaine rentrée et je voudrais d’ailleurs profiter de cette occasion pour remercier madame Massandjé TOURE LITSE,Directrice Générale du Conseil Café Cacao, qui nous accompagne dans ce combat contre le travail des enfants.
Mesdames et messieurs,
Grâce aux efforts du gouvernement ivoirien qui a investi 14 millions de dollars dans cette lutte, la Côte d’Ivoire est sur le chemin du changement tant sur le plan des mentalités que sur le plan des habitudes de nos paysans.
Je puis vous affirmer que la Côte d’Ivoire a fait d’énormes progrès durant ces quatre dernières années sur ce problème, qui est une préoccupation majeure du Président de la République et de son Gouvernement.
Et je voudrais vous assurer que la Côte d’Ivoire, avec l’appui de tous ses partenaires institutionnels ne ménagera aucun effort pour combattre ce fléau et offrir à tous les enfants vivants sur son territoire, un avenir meilleur.
Je vous remercie.